
Contexte
L’objectif de cette étude était de développer les règles de diagnostic clinique (RDC) les plus probantes pour l’identification des troubles patho-anatomiques les plus courants de la colonne lombaire, c’est-à-dire les disques intervertébraux, les articulations sacro-iliaques, les articulations facettaires, les os, les muscles, les racines nerveuses, les tissus nerveux périphériques et la sensibilisation du système nerveux central.
Une règle de décision clinique « est un outil clinique qui quantifie les contributions individuelles des divers éléments de l’anamnèse, de l’examen physique et des résultats de laboratoire de base au diagnostic, au pronostic ou à la réponse probable au traitement d’un patient.
Les règles de décision clinique tentent de tester formellement, de simplifier et d’augmenter la précision des évaluations diagnostiques et pronostiques des cliniciens » [McGinn TG].
Le raisonnement diagnostique axé sur la structure et l’anatomie est courant chez les cliniciens [Kent P], et il est considéré comme une composante essentielle du modèle biopsychosocial.
Référence pour le diagnostic des différentes structures

Les patients souffrant de lombalgie persistante ont souvent des idées fausses sur ce qui se passe [Main CJ], et peuvent avoir reçu toutes sortes d’explications spéculatives pour leurs symptômes, ce qui entraîne anxiété et confusion. Ces patients cherchent souvent à obtenir une explication sur ce qui ne va pas [Main CJ], et de nouvelles données suggèrent que le fait de fournir des explications et des informations claires sur l’étiologie, le pronostic et les interventions peut améliorer l’état des patients [Pincus T].
Donner une explication basée sur les meilleures preuves peut contribuer à
1) réduire la confusion et le chaos conceptuel du patient
2) rassurer le clinicien sur ce qui se passe
3) visualiser le bénéfice potentiel d’un traitement dirigé vers la structure douloureuse (l’imagerie mentale a été suggérée comme ayant un potentiel dans la gestion de la douleur [Berna C, Fardo F])
4) si les efforts ci-dessus sont couronnés de succès, motiver le patient à ouvrir une fenêtre thérapeutique.
Méthode
La méta analyse a utilisée les lignes directrices PRISMA.
Les bases de données MEDLINE, EMBASE et CINAHL a été combinée avec une recherche manuelle et un suivi des citations pour identifier les études éligibles.
Les critères d’inclusion étaient les suivants : personnes souffrant de lombalgie avec ou sans symptômes associés dans les jambes, antécédents ou résultats d’examen physique pouvant être utilisés dans le cadre de soins primaires, comparaison avec des normes de référence acceptables et rapports statistiques permettant de calculer la valeur diagnostique.
Les évaluations de la qualité ont été effectuées indépendamment par deux examinateurs à l’aide de l’outil d’évaluation de la qualité des études sur l’exactitude du diagnostic.
Les résultats de l’examen clinique qui ont été étudiés par au moins deux études ont été inclus et les résultats qui ont atteint notre seuil prédéfini de rapport de vraisemblance positif ≥ 2 ou de rapport de vraisemblance négatif ≤ 0,5 ont été considérés pour le RDC.
Résultats
Soixante-quatre études ont satisfait à nos critères d’éligibilité.
Nous avons pu construire des RDC prometteurs pour le disque intervertébral symptomatique, l’articulation sacro-iliaque, le spondylolisthésis, la hernie discale avec atteinte des racines nerveuses et la sténose spinale. Un test clinique unique ne semble pas être aussi utile que des groupes de tests qui correspondent davantage à la prise de décision clinique.
Les règles de diagnostic clinique
Disque intervertébral
- centralisation des symptômes
Articulation sacro iliaque
- pas de centralisation de la douleur
- douleur dominant dans l’articulation sacro iliaque
- 3 signes positifs sur 5
- écartement des ailes iliaques
- rapprochement des ailes iliaques
- poussée sur le genou hanche à 90° (tigh thrust test)
- Gaenslen’s test
- poussée sacrée (sacral thrust)
Hernie discale avec irradiation
- Lasègue positif en homolatéral
- 3 signes cliniques sur 4
- dermalgie dans le territoire de la racine touchée
- déficit sensitif
- areflexie
- déficit moteur
- Lasègue positif en controlatéral
Canal lombaire étroit
3 informations sur 5 retrouvées dans l’anamnèse
- âge supérieur à 48 ans
- symptômes bilatéraux
- douleurs aux membres inférieurs plus importante que celles du rachis
- douleur debout et/ou lors de la marche
- douleur soulagée en position assise).
- amélioration de la tolérance à la marche lorsque le rachis est fléchi
Spondylolisthésis
- glissement intervertébral à l’inspection ou à la palpation
- hypermobilité segmentaire ressentie à la mobilisation passive
- chez la personne âgée, douleur en extension passive de hanche
Conclusion
Les auteurs concluent, un diagnostic clinique fondé sur des preuves et présentant une précision acceptable réduira la nécessité de recourir à des méthodes de diagnostic invasives ou coûteuses (souvent assorties d’un temps d’attente et de frais importants).
La plupart des résultats ont été testés dans le cadre de soins secondaires ou tertiaires. Ainsi, l’exactitude des résultats dans un contexte de soins primaires doit encore être confirmée.
Ces règles de diagnostic clinique ont l’avantage de mettre en avant la dimension « bio » du domaine bio-médico-social. Il peut donner un moyen de visualisation pour le patient. Ce qui peut être utile dans nos explications surtout quand vous avez passé 4h d’explications sur les mécanismes de la douleur…. Et que celui-ci finit par vous demander mais ma douleur elle vient d’où exactement ?
Références bibliographiques


Petersen T, Laslett M, Juhl C. Clinical classification in low back pain: best-evidence diagnostic rules based on systematic reviews. BMC Musculoskelet Disord. 2017 May 12;18(1):188. doi: 10.1186/s12891-017-1549-6. PMID: 28499364; PMCID: PMC5429540.
Berna C, Tracey I, Holmes EA. How a better understanding of spontaneous mental imagery linked to pain could enhance imagery-based therapy in chronic pain. J Exp Psychopathol. 2012;3:258–73. doi: 10.5127/jep.017911.
Fardo F, Allen M, Jegindo EE, Angrilli A, Roepstorff A. Neurocognitive evidence for mental imagery-driven hypoalgesic and hyperalgesic pain regulation. Neuroimage. 2015;120:350–61. doi: 10.1016/j.neuroimage.2015.07.008.
Hancock MJ, Maher CG, Laslett M, Hay E, Koes B. Discussion paper: what happened to the ‘bio’ in the bio-psycho-social model of low back pain? Eur Spine J. 2011;20(12):2105–10. doi: 10.1007/s00586-011-1886-3.
Kent P, Keating JL. Classification in nonspecific low back pain: what methods do primary care clinicians currently use? Spine. 2005;30(12):1433–40. doi: 10.1097/01.brs.0000166523.84016.4b.
Main CJ, Foster N, Buchbinder R. How important are back pain beliefs and expectations for satisfactory recovery from back pain? Best Pract Res Clin Rheumatol. 2010;24(2):205–17. doi: 10.1016/j.berh.2009.12.012.
Main CJ, Buchbinder R, Porcheret M, Foster N. Addressing patient beliefs and expectations in the consultation. Best Pract Res Clin Rheumatol. 2010;24(2):219–25. doi: 10.1016/j.berh.2009.12.013.
McGinn TG, Guyatt GH, Wyer PC, Naylor CD, Stiell IG, Richardson WS. Users’ guides to the medical literature: XXII: how to use articles about clinical decision rules. Evidence-Based Medicine Working Group. JAMA. 2000;284(1):79–84. doi: 10.1001/jama.284.1.79.
Pincus T, McCracken LM. Psychological factors and treatment opportunities in low back pain. Best Pract Res Clin Rheumatol. 2013;27(5):625–35. doi: 10.1016/j.berh.2013.09.010.