Oldies but goldies, quelques notes passent les années sans que leurs conclusions soient trop remises en cause… Ou pas. Je profite de l’été pour ce retour vers le (peut être) futur. Note rédigée originellement dans ActuKiné le Mardi 22 Octobre 2013
Manifestement, la biomécanique de l’hallux valgus de Neil Armstrong n’était pas connue alors même qu’il se posait sur la Lune. Le problème semble provenir de la difficulté à appréhender précisément le pied en charge.
Il est évoqué que l’instabilité de la tarso-métatarsienne de l’hallux serait le premier facteur favorisant l’hallux valgus et que cette instabilité augmente avec la progression de la déformation.
Cette étude du Minnesota [1] publiée dans Physical Therapy s’est intéressée à l’attitude du pied lors de la marche simulée avec ou sans hallux-valgus :
La marche simulée de vingt femmes souffrant d’un hallux valgus (HV) a été scannée et comparée à celle de dix femmes sans hallux valgus.
Une éversion calcanéenne et une adduction du premier rayon majorées se retrouvait chez les patientes présentant cette déformation. L’axe du premier méta était incliné de 24° comparativement aux 6° du groupe contrôle. Cependant, la marche était simulée, les amplitudes dynamiques n’ont pas été mesurées et l’échantillon était faible.
Une étude préliminaire finnoise [2] publiée ce mois-ci a utilisé un scanner portable (???) pour analyser le mouvement du premier rayon lors de l’appui et au repos, chez 10 HV et 5 sujets sains comparables.
Elle a retrouvé l’importance de l’angle inter-métatarsien et la pronation de la première phalange chez les HV. Les différences significatives en charge mais non au repos suggèrent d’aller plus loin que les simples radiographies.
Dans les articles récents en accès libre sur le sujet, on retrouve une étude fluoroscopique (dynamic distortion-free fluoroscopy) allemande, à 25 images/secondes, en charge [3] qui a eu pour but de quantifier la mobilité sagittale in vivo lors de la phase d’appui (voir le montage en photo ci-dessous, pas encore applicable en clientèle de ville…)
La dorsi-flexion complète était de l’ordre de 5 ° chez les sujets sains et à peine plus chez les patients HV (non significatif). Le mouvement majeur se retrouvait dans l’articulation cunéo-naviculaire. Peut être que cette étude n’avait pas suffisamment de sujets pour mettre en évidence de faibles mais réelles différences.
Un praticien holistique ne peut en rester là et doit remonter plus en amont pour chercher une cause accessible pourquoi pas à la thérapie manuelle (on ne doute de rien). J’ai bien entendu quelque part que les rotations majorées de la hanche pourraient être responsables du pied trainant au sol et entrainant un hallux en valgus lorsque la phase de contact des orteils se fait en rotation latérale de hanche, mais où trouver autre chose que des supputations ?
Une étude récente [4] israélienne s’est intéressée aux articulations du membre inférieur et à ses déformations en rapport ou non avec l’HV. 25 patientes HV et 24 sujets contrôles, entre 51 et 80 ans ont été examinées (taille, amplitudes de hanche, genou, pied, hypermobilité générale, angle Q, recherche de genu-varum, valgum, …).
Elle conclut que les femmes HV sont plus laxes, présentent des amplitudes articulaires plus importantes, des «anomalies anatomiques» plus fréquentes. Pas trop de grain à moudre donc pour les thérapeutes manuels, plus habitués à «libérer» des articulations «grippées» qu’à contenir des articulations battant la breloque…
Une mise au point de 2010 dans Physical Therapy [5] évoquait des facteurs environnementaux variés, génétiques, des prédispositions anatomiques, mais une cause exacte inconnue, les interventions diverses soulageant mais n’empêchant pas l’évolution. Leur proposition de traitement est à base de semelles orthopédiques.
Références bibliographiques :
[1] Glasoe WM, Phadke V, Pena FA, Nuckley DJ, Ludewig PM. An Image-Based Gait Simulation Study of Tarsal Kinematics in Women With Hallux Valgus. Phys Ther. 2013 Jul 3. Article sous presse.
Résumé de l’article disponible en ligne
Articles en rapport avec le sujet
[2] Collan L, Kankare JA, Mattila K. The biomechanics of the first metatarsal bone in hallux valgus: a preliminary study utilizing a weight bearing extremity CT. Foot Ankle Surg. 2013 Sep;19(3):155-61. doi: 10.1016/j.fas.2013.01.003. Epub 2013 Feb 27.
Résumé de l’article disponible en ligne
[3] Martin H, Bahlke U, Dietze A, Zschorlich V, Schmitz KP, Mittlmeier T. Investigation of first ray mobility during gait by kinematic fluoroscopic imaging–a novel method. BMC Musculoskelet Disord. 2012 Feb 9;13:14. doi: 10.1186/1471-2474-13-14.
[4] Steinberg N, Finestone A, Noff M, Zeev A, Dar G. Relationship between lower extremity alignment and hallux valgus in women. Foot Ankle Int. 2013 Jun;34(6):824-31. doi: 10.1177/1071100713478407.
Résumé de l’article disponible en ligne
[5] Glasoe WM, Nuckley DJ, Ludewig PM. Hallux valgus and the first metatarsal arch segment: a theoretical biomechanical perspective. Phys Ther. 2010 Jan;90(1):110-20. doi: 10.2522/ptj.20080298. Epub 2009 Nov 19.