Elle se décline en fonction des particularités anatomiques des régions et de leur implication dans la cervicalgie.
Le rachis thoracique
Le traitement passif de la région thoracique serait le seul traitement passif reconnu dans le traitement des cervicalgies. Il rend obligatoire l’abord de cette région.
Quelle partie de la région thoracique traiter ?
Les praticiens en thérapie manuelle considèrent comme indispensable de faire un diagnostic précis de cette mobilité segmentaire afin de n’appliquer de traitement qu’aux segments considérés comme limités.
Que risque le patient d’un praticien appliquant une mobilisation passive thoracique sans diagnostic de mobilité segmentaire précis ?
Beaucoup d’études mettent en évidence l’intérêt de ces pratiques [12, 22, 47, 31, 15, 23] et appliquent ces techniques sans diagnostic de mobilité préalable. Il semble peu possible de se baser sur des preuves pour affirmer que ce serait plus efficace avec un diagnostic segmentaire : même si une fiabilité de ces tests peut être retrouvée parfois [14], elle n’est pas parfaite [46] et leur validité n’est pas encore établie.
Est-ce que le type morphologique thoracique importe ?
Une cyphose thoracique importante peut induire des cervicalgies : il suffit de demander à ces patients de se coucher en décubitus sur une table à matelassure dense pour s’en persuader ; les jeunes patients souffrant de maladie de Scheuermann comme les seniors réclameront un coussin pour éviter une impaction articulaire cervicale douloureuse en hyper-extension.
Le rachis cervical inférieur
Biomécanique
La partie inférieure du corps vertébral, convexe dans le plan frontal et concave dans le plan sagittal oriente les mouvements d’inclinaison latérale et de flexion / extension.
Les articulations postérieures, situées à 45° dans le plan sagittal orientent les rotations, qui se réalisent selon un axe perpendiculaire au plan des facettes : il y a toujours une inflexion latérale homolatérale couplée à la rotation [7].
Terminologie

La convergence
C’est le glissement de la zygapophyse supérieure sur la zygapophyse inférieure vers le caudal et le dorsal. Il est admis qu’elle se produit avec un rapprochement des surfaces articulaires : le terme est synonyme d’imbrication, hyper-habitation facettaire. La somme des convergences réalise l’extension. La convergence complète d’une articulaire gauche se fait en inclinaison latérale gauche, rotation gauche et extension.
La divergence
C’est le glissement de la zygapophyse supérieure sur la zygapophyse inférieure vers le crânial et le ventral. Il est admis qu’elle se produit avec une séparation des surfaces articulaires : le terme est synonyme de désimbrication, des-habitation facettaire. La somme des divergences réalise la flexion. La divergence complète d’une articulaire gauche se fait en inclinaison latérale droite, rotation droite et flexion.
Les défauts de mobilité cervicale inférieure
Selon les écoles de thérapie manuelle, raideur et douleur sont dissociées ou non. Un ostéopathe ne recherche que les raideurs, l’école de Maigne ne s’intéresse qu’aux douleurs, Maitland associe les deux observations.
Au niveau cervical, il semble que la sensation de raideur observée par le praticien corresponde fréquemment à la localisation de la douleur ressentie par le praticien. En thérapie manuelle orthopédique, trois types de limitations sont décrites [17] :
Une limitation en convergence
Elle est caractérisée par une provocation de la douleur et une limitation d’amplitude essentiellement lors de l’extension, de l’inclinaison latérale et de la rotation homolatérales. Cette limitation est associée avec une douleur reproductible lors du mouvement passif.
Le glissement dorso-caudal en imbrication est habituellement limité du côté de la douleur en compression.
Ce schéma de restriction en convergence est souvent retrouvé lors d’épisodes aigus et est alors fréquemment associé à une attitude antalgique : la tête est déviée en flexion et rotation du côté non douloureux afin d’éviter l’impaction articulaire postérieure. L’extension et la rotation sont fortement diminuées et douloureuses, associées à des contractions musculaires importantes.
Une limitation en divergence
Elle est rarement associée avec une attitude antalgique et il est rare que les symptômes soient intenses. Elle est envisagée lorsque la douleur est provoquée et/ou que le mouvement est réduit en flexion, inclinaison latérale et rotation controlatérales. Elle est associée avec une douleur homolatérale en étirement provenant des structures capsulo-ligamentaires, survenant habituellement en fin de mouvement.
Un mouvement passif combiné de flexion, inclinaison latérale et rotation controlatérales augmentera l’étirement de ces structures capsulo-ligamentaires et pourra reproduire les mêmes sensations douloureuses.
Il est évoqué des origines articulaires (étirement capsulaire) et/ou musculaires (mise en tension de l’élévateur de la scapula) de ces douleurs en étirement.
La limitation mixte du sujet âgé
Cliniquement, un tableau mixte peut être retrouvé chez ces patients, caractérisé par des limitations multisegmentaires et multidirectionnelles retrouvées sur des rachis inférieurs dégénératifs.
Ce type de rachis est caractérisé par une raideur globale, des restrictions de mobilité multiples, des douleurs à la fois en compression et en étirement, en convergence comme en divergence.
Quels signes cliniques sont en faveur d’une limitation articulaire segmentaire ?
Treize points sont à considérer [17] :
- La plainte principale doit provenir de la région cervicale
- Elle ne concerne qu’un ou deux étages vertébraux
- Le problème semble être ressenti comme mécanique par le patient
- Il n’y a pas de traumatisme direct récent de la région
- Il peut y avoir une perturbation biomécanique pouvant expliquer le déficit
- La souffrance est récente (moins de 38 jours)
- Il existe une rotation active limitée d’au moins 10° d’un côté par rapport à l’autre
- La douleur peut être clairement aggravée dans certains mouvements, diminuée dans d’autres
- Les tests de provocation peuvent reproduire la douleur
- Il n’y pas de déficits neurologiques retrouvés lors de l’évaluation manuelle,
- Il n’est pas estimé nécessaire de faire intervenir d’autres professionnels de santé pour des diagnostics complémentaires.
- Il n’y a pas de signes d’hypersensibilité d’origine centrale
- Le patient considère que la thérapie manuelle est susceptible de l’aider.
Les tests passifs de mobilité articulaire
Comme il est impossible d’évaluer d’éventuelles limitations en flexion segmentaire par appui ventro-dorsal sur le corps vertébral et aisé de le faire pour les limitations en extension segmentaire par appui sur les processus épineux, la plupart des méthodes de thérapie manuelle utilisent des tests en mobilisation passive postéro-antérieure.
Elles recommandent des mouvements mineurs en translation antéro-médiale de l’articulation postérieure et/ou en extension segmentaire.

Les résistances ressenties correspondent assez bien à la sensation par le praticien et le patient d’une articulation «déplacée» à laquelle on attribue la cause des douleurs, sensation pouvant persister au fur & à mesure des séances.
L’analyse de cette résistance, de son caractère, de son sens, font estimer au praticien une cause plutôt articulaire ou plutôt musculaire, un refus de recouvrement ou de découvrement facettaire, à partir desquelles il construit ses techniques :
- Une résistance «anormale» ressentie lors d’une poussée sur une articulaire en direction de la hanche controlatérale donne l’impression d’un refus de convergence homolatérale,
- Une résistance «anormale» ressentie lors d’une poussée sur une articulaire en direction caudo-crâniale donne l’impression d’un refus de divergence homolatérale,
- Une résistance «anormale» ressentie lors d’une poussée sur une articulaire en direction de l’articulaire controlatérale donne l’impression d’un refus de divergence controlatérale.
Il est possible que la théorie fut bâtie à partir de ces considérations pratiques.
Selon cette théorie, un segment peut être limité en convergence G ou D, divergence G ou D.
Limitations cervicales inférieures |
|
Limitation | Mouvement testé |
Convergence à G | Extension/rotation/inclinaison latérale gauches |
Convergence à D | Extension/rotation/inclinaison latérale droites |
Divergence à G | Flexion/rotation/inclinaison latérale droites |
Divergence à D | Flexion/rotation /inclinaison latérale gauches |
Quelle fiabilité pour ces tests ?
Globalement, la fiabilité en inter-examinateurs est faible à moyenne [35, 55]. Elle doit pouvoir s’améliorer s’il s’agit de répondre à une question binaire «est-ce que ce segment vertébral est d’une raideur plus importante que les segments sus et sous-jacents ?» plutôt qu’aux interrogations et gradations sur la qualité de la fin du mouvement.
Elle devient bonne quand il s’agit de se prononcer sur la présence d’une douleur provoquée par la palpation [53].
Quelle validité accorder aux tests ?
Ces tests ont été comparés dans diverses études à trois formes d’objectivation, le kinésithérapeute se prononçant sur :
- La présence d’une douleur zygapophysaire, l’articulation étant ensuite traitée par bloc anesthésique,
- La présence d’une raideur segmentaire comparée à des radiographies dynamiques,
- La présence d’un bloc congénital dans un échantillon de patients dont certains présentent cette variation anatomique.
Une étude passée à la postérité [28] a conclu à la parfaite validité de l’évaluation d’une douleur articulaire, le kinésithérapeute réalisant un «sans faute», mais cette belle histoire peine à être reproduite.
Repérer un défaut de mobilité passive semble d’une validité moyenne lorsque la manoeuvre est comparée à des clichés radiologiques dynamiques [21, 48], ou des blocs congénitaux [27].